Elle avait, mi-décembre, signé une sixième victoire à Vincennes sous la selle. Mais Heuristique, acquise 7500 € lors de notre vacation 2021 réservée aux foals, a, lors de la réunion du Prix d’Amérique 2025, pris une autre dimension en enlevant le Prix Jacques Andrieu, premier Groupe II auquel elle participait. Qui plus à la manière des forts.
Alors qu’elle comptait précédemment cinq succès tous acquis à l’attelage, et ce sur des anneaux provinciaux corde à droite, mais aussi quatorze disqualifications en trente-cinq sorties, Heuristique a, en décembre 2022, brillé une première fois à Vincennes, déjà sous la selle. Une aptitude à porter l’homme confirmée, pareillement chaussée des quatre pieds, par deux premiers accessits, puis par une quatrième place « PADP » (plaquée des antérieurs et déferrée des postérieurs). Une configuration dans laquelle elle connaît ensuite des problèmes d’allures, bénéficiant alors d’un break avant d’être repréparée essentiellement au sulky, puis de nouveau présentée mi-décembre 2023 au monté « PADP », étant à cette occasion la note de course (venue de l’arrière-garde, elle se désunit dans le final alors qu’elle s’annonce menaçante pour les premiers). Une bévue aussitôt rattrapée par deux troisièmes places avant de laisser, fin janvier 2024, des regrets lors d’une tentative à l’attelé (fautive et disqualifiée au signal et remarquée au second plan), puis de signer, du 8 février au 23 mars, trois succès consécutifs sous la selle dans le temple du trot, à chaque fois au prix d’une progression entamée depuis la côte de la piste noire. Suivent deux nouvelles disqualifications en mai, puis, après un été off et une course de rentrée, une belle série automnale, une victoire au monté au Croisé-Laroche et deux à Vincennes, toujours « PADP », encadrant deux accessits à l’attelé dans l’Ouest, ferrée. Et si sa tentative, fin décembre, dans le Groupe III Prix Yvonnick Bodin, appelant les seuls apprentis, est à oublier, elle n’échoue ensuite que du minimum dans une Course B avant d’écrire, cette fois présentée « D4 » par son entraîneur Jean-Philippe Raffegeau et associée au partenaire attitré de ses réussites Paul Philippe Ploquin, un scénario inattendu mais gagnant dans le convoité Prix Jacques Andrieu.
« Un travail d’orfèvre »
C’est ainsi que le dimanche 26 janvier 2025, élancée franchement en dehors, elle s’installe au commandement dès le début de la descente, accélère dans la première partie de la montée, puis repart de plus belle au sortir de l’ultime courbe pour se défaire de la qualiteuse opposition et s’imposer avec brio.
Une récompense ô combien méritée pour son mentor et copropriétaire assailli par l’émotion aux balances et à propos duquel Lionel Guillaume, naisseur de la jument sous l’appellation S.A.S. LG Services, a déclaré au quotidien digital 24 H AU TROT : « C’est ma plus belle victoire après 50 ans d’élevage. Un immense coup de chapeau à Jean-Philippe Raffegeau qui l’avait achetée foal aux Ventes de Caen. Il a fait un travail d’orfèvre car elle était particulièrement compliquée à l’âge de 2 ans*… Il faut dire aussi qu’il a créé un duo exceptionnel avec Paul Ploquin ; avec Heuristique, c’est devenu un mariage sans nuage, c’est magnifique ».
Concernant le pedigree de la demoiselle, qui ne dévoile aucun inbreeding à cinq rangs, il est riche de top gènes monté. Ainsi, son père, Very Nice Marceaux, gagnant semi-classique et placé classique à l’attelage, est un fils du crack polyvalent Jag de Bellouet (Prix d’Amérique, de France et de Paris mais aussi sacré à trois reprises dans le Prix de Cornulier). Alors que sa génitrice, Madame Melleray, est née de l’union de deux lauréats classiques sous la selle : Dream With Me (Prix de Paris mais également Prix de Cornulier, deux fois, et Prix des Centaures) et la gagnante du Prix de Vincennes 1993 Charmeuse Bégonia, propre sœur d’Iroise Bégonia (neuf fois à l’honneur à Paris et placée de Groupe 3 – 276 K€), sœur utérine du semi-classique Tabriz Bégonia (3e du Prix Louis Dubu), et tante de Radieux Bégonia (340 K€). De surcroît, Madame Melleray est également la génitrice de la classique monté Scolie de Bassière (535 K€ – douze victoires dont deux sous la selle, 2e du Prix de Normandie et 3e du Prix de Cornulier). Ce avant d’engendrer l’excellente compétitrice Girl de Bassière (344 K€ – onze succès et à l’arrivée de neuf Quinté+). Tandis que Ulmia de Bassière et Vous et Moi, autres filles de Madame Melleray, se sont elles aussi imposées avec l’homme sur le dos, la seconde citée à Vincennes, dès sa première apparition publique, avant d’entrer tôt au haras et de produire Gamay (134 K€ – 4 succès au monté dont un à Vincennes).
La souche de la gagnante semi-classique Lady Bégonia
Nous sommes là au sein d’une riche souche maternelle partant de Lady Bégonia 1’25 (1933), lauréate du semi-classique Prix de Basly et dont descendent aussi, via sa fille Dame Bégonia (1947), les Oréo Barbés (238 K€), huit fois victorieux à Vincennes et gagnant du Grand Prix d’Hiver, à Sterrebeek, dans les années 80, Paloma Barbés (132 K€ – 6 succès à Vincennes), Uhlan de Cocherel (270 K€), placé semi-classique, statut également obtenu, au monté, par Vorglande (97 K€), sœur utérine de Chatou (147 K€) et Déa des Neuf Clos (121 K€) et aïeule de Vloum de Bois (160 K€) et Elnino Montaval (227 K€ – vainqueur de Quinté+ et placé de Groupe 3 à Vincennes). Un creuset auquel appartient aussi Caballio in Blue (147 K€), fils de Quadrophénio comme Charmeuse Bégonia, quadruple lauréat à Vincennes, particulièrement des Coupes Régionales des 3 Ans et des 4 Ans, et devenu l’auteur du crack Késaco Phédo, quadruple lauréat de Groupe I dont deux fois sous la selle.
Un recensement non exhaustif que nous poursuivrons en citant les demi-sœurs Gina Pride (131 K€) et Kina Pride (138 K€), toutes deux gagnantes à Paris au monté, Kaola des Picanes (130 K€ – un succès de Groupe 3), L’An Deux Milles (178 K€), Noble Limousin (260 K€), Ramsès de Vaudon (235 K€), les frères utérins Rock Barbés (359 K€ – gagnant de Groupe 3) et Speedy Barbés (211 K€ – double placé de Groupe 3), Texas Flo (189 K€), Axe des Champs (272 K€), Bolide des Champs (202 K€) et leur demi-frère Galopin des Champs (193 K€), Butterfly Eldé (157 K€), la classique Câline Eldé (212 K€ – 5e du Prix de l’Étoile, une victoire de Groupe 3 et trois accessits de Groupe II) et Gladys du Cèdre (235 K€ – trois succès à Paris).
Enfin, concernant l’ascendance de Lady Bégonia, nous remontons, via notamment son arrière-petite-fille Glorieuse (1873), laquelle procréa la championne Finlande (Prix Bayadère, Saint-Léger, Derby des Trotteurs), à la jument base Brillante (1859), grand-mère de Vert Galant II (Saint-Léger de Caen).
*N.D.L.R. : Heuristique, copropriété de l’Écurie J.Y. et J.P. Raffegeau et de MM. Thierry Massicot et Dominique Bouchet, a d’abord été qualifiée au monté en 1’19’’3, à Meslay-du-Maine en février de ses 3 ans, avant de l’être au sulky, dans la réduction de 1’17’’2, au mois d’août suivant sur le même hippodrome.
